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  • julienphilippe4

Blue Usher cult

Blue velvet m’apparaît de plus en plus comme une histoire de hantise en miroir : Dorothy Vallens et son appartement sont comme deux hantises imbriquées, qui se nourrissent l’une l’autre. Comme la maison Usher reflétait la psyché malade de ses habitants, l’appartement sombre et peuplé de sons étranges vit à l’unisson de l’esprit malade de Dorothy : souffles, ombres, lumières chancelantes, tout semble ramener à l’imaginaire gothique dans l’appartement pourtant moderne de la rue Lincoln.


Les rideaux de l'appartement de Dorothy, agités par le vent

Dorothy Vallens habite un immeuble hanté, ou peut-être pourrait-on dire que l’immeuble est parasité, contaminé par sa psyché. Elle est le cœur battant où convergent les déraisons, les monstres et les désirs ; son appartement est le lieu central du labyrinthe, là où le secret est caché, là où une brèche est ouverte sur l’autre monde, dont Dorothy est l’intercesseur.

Lorsqu’elle court dans le couloir de l’appartement, aiguillonnée par le bruit du jouet de son enfant que Jeffrey Beaumont vient d’actionner, la scène dure trois secondes et paraît pourtant bien plus longue. Le temps s’étire et se fige dans l’appartement de Dorothy et elle n’en finit pas de courir dans les corridors de son labyrinthe. L’homme en jaune, m’a toujours paru également englué dans la toile du temps, et son étrange balancement le rend pareil au métronome de la psyché malade de l’appartement.


Le balancement de l'homme en jaune

Rideaux rouges dans le vent, couloir bleuté aux appliques tremblantes, le balancement final de l’homme en jaune : quelque chose pulse dans l’appartement de Dorothy Vallens comme dans son coeur, dans une symbiose maladive à la façon de la maison Usher. La hantise se dévoile par le son, cet infra-grondement obsédant comme un murmure, par les ombres de l’appartement ou du couloir, sombre comme une robe de velours bleu, par ce long plan de rideaux dans le vent qu’on retrouve chez Poe dans La Chute de la maison Usher :

« À l’instant même, comme si l’énergie surhumaine de sa parole eût acquis la toute-puissance d’un charme, les vastes et antiques panneaux que désignait Usher entr’ouvrirent lentement leurs lourdes mâchoires d’ébène. C’était l’œuvre d’un furieux coup de vent »


Les rideaux agités par le vent dans l'adaptation de La Chute de la maison Usher de Jean Epstein.

L'apparition finale de Dorothy, nue et hagarde, saisit comme le surgissement de "lady Madeline Usher, enveloppée de son suaire" - lointain écho là-aussi de l'imaginaire gothique, tremblant et déformé, dans le monde de Lynch ?

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